Image du parfum « Si » de Giorgio Armani, elle est tout aussi enivrante dans le dernier Woody Allen.
C’est le rôle d’une bourgeoise new-yorkaise, épouse d’un riche homme d’affaires, qui n’a d’autre activité que de se pomponner, recevoir ses amis et courir les boutiques chics. Hermès, Roger Vivier, Louis Vuitton… Qu’importent les étiquettes, les vêtements de Cate Blanchett dans Blue Jasmine, le dernier opus de Woody Allen, sont si joliment coupés, les matières si belles, qu’ils la subliment. Ou plutôt qu’elle les sublime.
Car l’élégance pour Cate Blanchett n’a rien d’un rôle de composition. «Celle de Jasmine, précise-t-elle cependant, est éloignée de la mienne, car l’élégance, c’est trouver son propre style.» Le cinéaste à la clarinette, comme le couturier Georgio Armani dont elle est devenue l’égérie du nouveau parfum Si, ne l’ont pas choisie sans raison. L’actrice est bien autre chose qu’un faire-valoir de luxe. «Si est mon hommage à la féminité moderne, explique Georgio Armani, un irrésistible mélange de grâce, de force et d’esprit d’indépendance.” Une alchimie entre l’être et le paraître, en somme, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Sauf à Cate. Il y a ce qui s’explique – une beauté diaphane, une silhouette longiligne, un brin androgyne -, et ce qui ne s’explique pas: une photogénie incroyable, un regard puissant, une singularité sereine, jamais agressive, juste là. Lucide, la star australienne juge son visage «extrêmement banal, donc malléable», ajoutant avoir été la première «surprise par tous les possibles que mon physique m’a offerts.».
>Les secrets de beauté de Cate Blanchett
Son premier grand rôle, celui qui l’a révélée en 1998, emperruquée, engoncée dans de lourdes robes écarlates, hiératique en diable, est Elisabeth, devant la caméra de Shekhar Kapur. Il y aura beaucoup d’autres personnages altiers – une reine encore, des elfes cette fois, dans Le Seigneur des anneaux et Le Hobbit -, mais il y aura surtout des personnages féminins phares, comme une Katharine Hepburn, à qui on la compare volontiers, dans Aviator de Martin Scorcese aux côtés de Leonardo DiCaprio, et des transformations choc: en Bob Dylan dans I’m no there ou en vieille dame face à Brad Pitt dans L’étrange histoire de Benjamin Button. A son tableau, des cinéastes pointus comme ou Steven Soderbergh (The good German). Et toujours, malgré les Oscars, malgré les hommages, une fidélité à ce qui l’a construite: le théâtre. Ce ne fut pourtant pas sa première vocation.
>Cate Blanchett faite chevalier des Arts et des lettres
Fille d’une institutrice de Melbourne qui l’a élevée, elle et sa sœur, seule, après la crise cardiaque fatale de leur père – Cate avait alors dix ans -, elle a songé un temps à devenir architecte, a tâté des cours d’art plastique, mais c’est en prenant des leçons d’art dramatique qu’elle a trouvé sa voie. Le cinéma aura beau la consacrer ensuite, elle n’abandonnera jamais les planches. Jusqu’à accepter en 2008 de codiriger avec son époux, l’écrivain et réalisateur Andrew Upton, la prestigieuse Sydney Theatre Company. Sans crainte que les studios hollywoodiens l’oublient. Trop heureuse de retourner au pays et d’offrir une vie normale à leurs trois fils, Dashiell (douze ans), Roman (neuf ans) et Ignatius (cinq ans).
Parce que celle qui n’a jamais eu besoin de se déshabiller ni de se galvauder à l’écran pour réussir, est aussi une épouse fidèle et heureuse – seize ans de mariage! – et une mère de famille épanouie! Liv Ullmann, l’actrice fétiche d’Ingmar Bergman, qui l’a dirigée au théâtre dans Un tramway nommé désir, se souvient: « Partout où nous avons joué, à Sydney, à Washington, ses enfants étaient dans la loge le soir de la première, je n’en revenais pas! Elle ne cessait jamais d’être leur mère jusqu’au moment d’entrer en scène. Je ne connais aucune actrice comme elle.» Il n’y en a pas beaucoup non plus qui exècrent les subterfuges de la chirurgie esthétique, qui s’engagent à ne pas y avoir recours et qui ne cessent de rappeler: «Plutôt que combattre des chimères et vivre d’utopie, essayons de profiter de chaque minute!» Le Botox ne comble pas le vide intérieur. A quarante-quatre ans, Cate Blanchett est « pleine ». D’amour pour les siens, de passion pour son métier d’actrice. Trop bien dans sa peau pour user d’arrogance ou de caprice. Elégantissime. A la question:”Qu’est-ce qui vous stresse le plus?», elle ne répond pas un problème de boulot ou de rides, mais « faire attendre quelqu’un à un rendez-vous. C’est très irrespectueux. » Tout est dit.