A 38 ans, elle a déjà tué (Les Blessures Assassines), tutoyé Piaf (La Môme) et même coiffé la frange de Sagan. Dans son nouveau film, Je Ne Dis Pas Non, l’actrice caméléon (deux Césars) croque les hommes à la chaîne… Et dans la vie?

Quelques secondes suffisent à confirmer la réputation de crème qui suit Sylvie Testud depuis ses débuts au cinéma. Vive comme l’éclair, cordiale à mort, elle enchaîne les interviews, remercie mille fois la serveuse pour sa salade verte, revient à vous, déploie un trésor d’anecdotes, précise sa pensée à grands renforts d’images rigolotes. Dans son nouveau film, Je ne dis pas non, elle passe d’un homme à un autre avec une frénésie pathologique. Son inverse absolu : Sylvie a beau papillonner avec tous les genres au cinéma, dans la vie, elle n’a rien d’un cœur d’artichaut.

Gala: Pourquoi Je ne dis pas non?

Sylvie Testud: Pour le titre, que j’adorais. La société trouve très normal que les hommes ne soient pas toujours très amoureux des femmes lorsqu’ils couchent avec elles. Mais l’inverse est plus difficile à accepter… Je ne revendique rien, mais quand même… Il vaut mieux être accompagnée que seule, partager des moments sensuels, même s’il n’y a pas nécessairement de grands sentiments. On ne croise pas l’amour à tous les coins de rue. C’est bien de se l’avouer parfois.

Gala: Parce que selon vous, les femmes sont plus sentimentales que les hommes?

S. T.: Elles se disent toujours «je l’aime, je l’adore», mais elles se mentent. Sauf mon personnage qui ne transige jamais… J’aime beaucoup ce film parce qu’il montre la pression qu’on peut vous mettre lorsque l’on vous témoigne de l’amour. Bon, j’y réfléchis au moment où je vous parle… Quand on vous dit « je t’aime bien », on y va presque pour faire plaisir. Et paradoxalement, on se rend compte du pouvoir que l’on a sur l’autre.

Gala: Votre personnage déborde d’activités. C’est un peu vous, non?

S. T.: Pas tout à fait. Je mets beaucoup d’énergie à fuir tout ce qui est établi. Au cinéma, j’ai une trouille monstre d’être confinée dans un rôle. Plus largement, je me fuis. C’est difficile à expliquer, mais je ne veux pas que la vie prenne le pas sur moi. Je ne veux pas être une adulte certifiée. L’adolescence est un moment sublime parce qu’on ne sait pas ce qu’on va devenir. Ça m’angoisse de voir les autres suivre une voie toute tracée. Alors moi, vous imaginez…

Gala: En même temps, vous vivez depuis longtemps avec le même homme…

S. T.: Oui, enfin, tout cela est très compliqué… En tant que nana, je suis en place. Mais, à côté de ma vie de couple, j’ai envie de me tromper moi-même, des prendre des chemins de traverse. Là par exemple, je discute avec vous, je trouve ça très agréable. Mais si on se retrouvait toutes les semaines, ça finirait par m’oppresser.

Gala: Vos proches doivent souffrir terriblement!

S. T.: C’est infernal pour eux. (rires) J’ai de supers bons amis et j’espère qu’ils seront canonisés un jour. Mon attitude les remet sans cesse en question. Certains ne sont pas dupes… Il y a huit ans, j’ai repris contact avec un ami d’enfance. Le premier truc qu’il m’a dit au téléphone, c’est: «Alors Sylvie ? Toujours aussi folle?». Ca fait du bien de se faire bousculer.

Gala: Et Ruben, votre fils de quatre ans, il vous bouscule?

S. T.: Evidemment! Les enfants développent une sincérité désarmante, très brutale. L’autre jour, mon fils a dit à son père «qu’il avait les dents jaunes». C’est archi-faux, mais après coup, il était vert… Mon fils, j’essaie toujours de le surprendre. Je lui fais la roue par exemple. C’est ridicule… Avec les metteurs en scène, je guette la petite lueur dans leurs yeux. Dans son regard à lui, je ne cherche pas de lueur, mais un brasier. Je ne veux pas le décevoir. Quand en fin d’année, je loupe le spectacle de l’école, ça me rend dingue. J’ai dû me rendre à Budapest alors qu’il chantait avec sa chorale, il a fallu que je le lui explique… C’était terrible.

Gala: Pour rester auprès de lui, «sacrifiez-vous» certains tournages?

S. T.: (Gênée) Non… Mais il vient souvent avec moi. Et quand je suis avec lui, je suis disponible à mille pour cent. Lorsqu’il était tout petit, il avait une nounou qui s’occupait de lui le matin. En revanche, il ne m’a jamais vue crevée.

Gala: Un deuxième enfant est toujours dans l’air?

S. T.: Oui… Si j’avais su, j’en aurais fait quatre!

Propos recueillis par Guillaume Loison

Article paru dans Gala, juillet 2009

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