Depuis lundi 2 février, l’Etablissement français du sang (EFS) ne bénéficie plus du monopole de production de plasma thérapeutique, dit “SD“ fabriqué à partir de dons de sang. L’EFS n’a plus le droit de fabriquer ce plasma, qui va désormais être produit par d’autres sociétés. Cette annonce a suscité des craintes de l’EFS sur la sécurité des receveurs et des donneurs qui pourraient être bientôt rémunérés.

Chaque jour, l'EFS collecte 10 000 dons de sang en France métropolitaine et dans les DOM-TOM.

En juillet 2014, une décision du Conseil d’Etat ouvrait à la concurrence la commercialisation d’un type de

plasma thérapeutique, dit “SD“, jusqu’alors monopole de l’EFS. Depuis lundi, d’autres sociétés privées peuvent commercialiser ce plasma thérapeutique “SD“ car il est désormais considéré comme un médicament et non plus comme un “produit sanguin labile“, monopole de l’EFS. Ce plasma ne sera plus produit par l’EFS, mais l’Etablissement continuera de le distribuer même s’il est fabriqué par d’autres sociétés. 
Cette décision fait suite à la demande de la société Octapharma France (du groupe suisse Octopharma), pour obtenir une autorisation de mise sur le marché (

AMM) de son plasma SD “Octoplas“. “La fabrication de ce plasma thérapeutique “SD“ ne représentait que 10% des missions de l’EFS. Nous produisons toujours deux autres types de plasma thérapeutique, que nous sommes les seuls à fournir aux établissements de santé de la métropole et des DOM-TOM“, précise le Dr François Charpentier, directeur de la chaîne transfusionnelle à l’EFS.La concurrence va-t-elle amener à la fin de la gratuité du don du sang ?
En France, le don de sang est bénévole, volontaire et gratuit. Quel que soit le don effectué (sang total,

plaquettes, plasma), il est assuré uniquement par l’EFS. Selon Roger Praile, président de la Fédération française pour le don de sang bénévole, “la non-rémunération du donneur du produit sanguin permet une meilleure sécurité lorsqu’en tant que, malade ou blessé, on doit recevoir des produits sanguins sécurisés“.
Mais la décision du Conseil d’Etat d’ouvrir la fabrication du plasma “SD“ à la concurrence soulève des questions d’éthique. Les donneurs à qui Octapharma fera appel pour fabriquer “Octaplas“ seront-ils rémunérés ? S’agira-t-il de sang prélevé en France ou à l’étranger ?
Face à toutes ces questions qui visiblement remettent en question le caractère éthique du don de sang, le Dr Charpentier souhaite mettre fin à la rumeur d’une éventuelle rémunération des donneurs en France : “Cette décision du Conseil  d’Etat ne va absolument rien changer pour les donneurs et les receveurs. En France, le don de sang reste bénévole, volontaire et gratuit. L’EFS reste le seul établissement en charge des dons du sang. Quant au plasma thérapeutique “SD“, les sociétés qui vont le fabriquer et le distribuer devront prouver qu’il est issu de sang prélevé de façon éthique (sans rémunération des donneurs), en France ou à l’étranger“.Marisol Touraine assure que “le don éthique est garanti“
Le 27 janvier, des dizaines de salariés de l’EFS s’étaient rassemblés devant le ministère de la Santé pour dénoncer une “marchandisation du sang“ et pour obtenir des réponses et des engagements sur l’avenir de l’EFS. Cette ouverture à la concurrence pourrait d’abord faire disparaitre des emplois à l’EFS, mais surtout, elle peut laisser penser que le sang utilisé pour le plasma  “SD“ provient de dons rémunérés à l’étranger. La ministre de la Santé Marisol Touraine a immédiatement tenu à rassurer les salariés de l’EFS en déclarant que “le don éthique était garanti“. Mais jusqu’à quand ?
Alors qu’en France, le don de sang est bénévole ; aux Etats-Unis ou en Tanzanie, le sang est considéré comme un bien marchand, donc rémunéré.Annabelle Iglesias
Sources :
– Entretien avec le Dr François Charpentier, directeur de la chaîne transfusionnelle à l’EFS, le 4 février 2015.- Communiqué de presse de l’EFS et de la FFDSB, 4 février 2015.