Une enquête de la Fédération hospitalière de France révèle d’incroyables disparités dans le nombre d’opérations chirurgicales pratiquées d’un département à l’autre. Ces disparités régionales montrent que beaucoup de ces actes sont inutiles. Comment mieux évaluer et valoriser la pertinence des actes médicaux ?

Sommaire

  1. Opérations inutiles : d’incroyables disparités régionales
  2. Des pratiques à changer, un mode de rémunération à réviser
  3. 9 médecins sur 10 reconnaissent avoir prescrit des actes inutiles
  4. Les Français seraient prêts à adopter des solutions radicales

Opérations inutiles : d’incroyables disparités régionalesCinq opérations parmi les plus courantes ont été étudiées dans le cadre de cette enquête : la césarienne, le pontage coronaire, la chirurgie du rachis, l’endoprothèse vasculaire et les interventions sur le cristallin (l’opération de la cataracte essentiellement). Résultat : les cartographies montrent que le recours à ces actes varie de manière très importante d’une région à l’autre.

  • Concernant la chirurgie du rachis, une opération lourde et risquée, on note que le taux de recours en Ile de France est compris entre 102 et 128, alors qu’il varie de 177 à 192 en Bourgogne Franche-Comté ! Les hernies discales sont beaucoup plus opérées dans l’Est, le Sud-Ouest et le Sud-Est qu’en région parisienne ou dans le Rhône. Et il ne s’agit pas là d’un problème d’offres médicales, puisqu’au contraire, on opère moins dans les régions où il y a plus de praticiens !
  • Concernant la pose de stent (coronarien ou vasculaire) sans infarctus, la Bretagne affiche un taux de recours entre 160 et 214, tandis que l’Alsace Champagne Ardenne Lorraine montre un taux compris entre 272 et 353. Des disparités encore plus frappantes dans le privé que dans le public.
  • Pour les césariennes, les taux entre départements varient de 1 à 20 selon que l’on est dans le secteur public ou privé ! Comment expliquer de telles disparités pour une opération qui n’est pas anodine ? Cet acte est plus rémunérateur qu’un accouchement classique pour l’établissement, il a en plus l’avantage de pouvoir être programmé… Accouchement plus “confortable” pour le praticien ? Pression de parturiente qui demanderait une “césarienne de confort” ?…
  • Pour les chirurgies du cristallin (opération de la cataracte), les disparités entre secteur public et privé laissent apparaître qu’il s’agit d’une orientation stratégique de cliniques privées privilégiant ces opérations de la cataracte rémunératrices et qui peuvent être programmées longtemps à l’avance.

Des pratiques à changer, un mode de rémunération à réviserCes disparités ne peuvent s’expliquer pas de simples critères démographiques. Comment expliquer alors que dans certaines régions, les chirurgiens aient le bistouri plus “facile” ? Quid de la santé des patients opérés sans toujours une réelle justification ? Quelles sont les raisons de cette ferveur chirurgicale et ses conséquences sur les comptes publics ? “Ces disparités doivent être analysées afin d’en comprendre précisément les raisons. Mais surtout, elles soulignent la nécessité de s’emparer désormais de ce sujet pour des raisons de santé publique et économiques” commente pudiquement la Fédération Hospitalière de France.La tarification à l’activité décriée depuis de nombreuses années a pu favoriser de telles dérives : les établissements sont rémunérés en fonction de leur activité et chaque activité a une valeur particulière. De fait, un chirurgien pourrait être tenté de favoriser la solution chirurgicale pour conserver le budget de son service. Mais la pertinence des soins, ce n’est pas uniquement une chirurgie “inutile”, cela peut être une IRM demandée au lieu d’un scanner, des prises de sang inutiles…9 médecins sur 10 reconnaissent avoir prescrit des actes inutilesSelon l’enquête Odoxa pour le compte de la Fédération Hospitalière de France (FHF) sur la pertinence des actes et examens médicaux (943 Français, 3002 Européens, 442 médecins et 134 directeurs d’hôpitaux y ont répondu) :

  • Les trois-quarts des Français (76%) jugent que les actes médicaux non justifiés constituent un problème important en France aujourd’hui
  • Selon les Français (34%) comme les médecins (35%) ces actes inutiles représenteraient plus d’un tiers des actes médicaux.
  • Pire, 9 médecins sur dix (88%) reconnaissent qu’il leur arrive personnellement d’en prescrire… sans doute à cause d’une poussée des craintes juridiques : 68% des médecins et 54% des directeurs d’hôpitaux disent avoir peur d’être poursuivis par leurs patients.
  • Pourtant 77% des Français pensent que lutter contre ces actes médicaux injustifiés constituerait un moyen efficace de faire des économies à notre système de santé… mais, ils sont convaincus (78%) que les hommes politiques en charge de la santé ne se préoccupent pas assez du sujet.

Les Français seraient prêts à adopter des solutions radicalesSelon ce même sondage, les Français seraient largement favorables à des solutions radicales permettant de lutter contre les actes inutiles, y compris en faisant eux-mêmes des efforts :

  • 81% des Français sont ainsi POUR l’obligation d’un second avis avant la réalisation d’actes chirurgicaux lourds et autant se prononcent POUR la mise en place d’un service téléphonique de régulation des urgences
  • 85% des Français pensent que communiquer sur les écarts de pratiques des médecins pourrait améliorer les prises en charge médicales, et autant (87%) souhaitent que les hôpitaux rendent publics leurs résultats en matière de qualité et de pertinence des soins.
  • 86% pensent que les mesures visant à responsabiliser les patients et les professionnels de santé pourraient avoir un impact positif pour diminuer le coût des soins en France.
  • Enfin, les Français se prononcent surtout la fin de la tarification à l’acte : 64% à 72% pensent qu’une autre rémunération des professionnels de santé et des hôpitaux serait “juste”, “efficace”, “positive pour les Français”, “moins coûteuse” et surtout qu’elle serait “possible” (72%).

La ministre de la Santé Agnès Buzyn a récemment déclaré que 30% des dépenses de l’Assurance Maladie ne seraient pas pertinentes, évoquant certaines chirurgies qui seraient pratiquées pour justifier de l’activité d’un service. Cette étude accrédite cette vision et semble plaider pour une correction de certains abus, non pour économiser mais pour pouvoir redistribuer l’argent là il serait plus pertinent.Click Here: cheap all stars rugby jersey