Maux de têtes, picotements des yeux… La fatigue visuelle est le lot quotidien de nombreux travailleurs sur écran. Pour y faire face, un traitement ophtalmologique et quelques modifications du lieu de travail permettent de garder bon pied, bon oeil !

Elément de plus en plus incontournable du monde moderne, lesordinateurs font partie du quotidien de millions desalariés. Mais le travail sur écran est accuséde causer des troubles visuels, une sécheresse oculaire,etc. Qu’en est-il réellement ? Doctissimo fait le point sousl’œil bienveillant et expert du Pr. Jean-Claude Hache,président de la société scientifique decorrection oculaire.Il y a fatigue et fatigue…La fatigue liée au travail sur écran est directementproportionnelle au temps passé devant sa console maiségalement à la qualité de la vision del’observateur. Cette sensation peut revêtir trois formes:
Fatigue visuelle : C’est le phénomène leplus fréquent avec la sensation de ne plus être aussiperformant tant sur le plan de la vision qu’intellectuellement. Ils’agit rarement d’une baisse de l’acuité, mais plus souventun déséquilibre binoculaire avec des impressionsd’images qui se dédoublent ou deviennent floues. Ce type defatigue apparaît plus fréquemment sil’amétropie ou la presbytie n’est pas corrigée ;
Fatigue oculaire : Les yeux qui piquent, irritations,sensations d’oeil sec… ces signes caractéristiques sontliés à une insuffisance de sécrétionlacrymale particulièrement mal vécue. Normalement, lafréquence du clignement est de l’ordre de 12 à 20 parminute, permettant la formation d’un nouveau film lacrymal avant larupture du précédent. Mais le travail surécran est associé à une diminution de cettefréquence et donc un assèchement de la surface desyeux ;
Fatigue générale : Cette dernière semanifeste par des maux de tête, mais également desdouleurs rachidiennes (mal de dos) liés à desproblèmes de posture.La fatigue peut également avoir une influence directe sur laqualité du travail effectué. Ainsi, plusieursétudes témoignent d’un impactdélétère sur l’efficience définie parle rythme de lecture et la capacité à intégrerles informations. Ce paramètre peut êtreapprécié grâce à un photo-oculographe(ou suiveur de regard), qui permet la mesure et l’analyse de ladirection du regard par l’enregistrement du parcours oculaire lorsdu suivi d’une cible en mouvement ou de l’exploration d’un texte.Résultat : cette efficience diminue à mesure que ladurée du travail sur écran augmente. Un argument pourne plus quitter trop tard le travail…Plus souvent un révélateur de troublesvisuels…Si le temps de travail sur écran est trop long, la fatiguepeut apparaître du fait de la focalisation sur l’écranmais aussi de l’immobilité liée à desproblèmes posturaux. Mais la fatigue peut égalementsurvenir beaucoup plus tôt si la personne souffre d’untrouble visuel non-corrigé, principalement astigmatisme ouhypermétropie.Dans les cas d’hypermétropie latente survenant entre 30 et40 ans, la fatigue intervient plus fréquemment et plusrapidement. Ce type de travail agit alors comme unrévélateur de ce trouble de la vue associéà une vision floue de près alors que la vision deloin reste correcte. Si l’hypermétropie estlégère, elle peut passer inaperçue. Plusimportante, elle peut entraîner un strabisme convergent, unefatigue visuelle importante et des maux de têtes.Lorsque les deux images des deux yeux ne se superposent plusexactement, les personnes peuvent souffrird’hétérophorie (tendance au strabisme). Le strabismedésigne l’absence de parallélisme entre les axesoptiques des deux yeux lors de la fixation d’un point. L’origine dustrabisme peut être liée à une fortehypermétropie ou à une originehéréditaire. Selon l’âge auquel il est pris encharge, son traitement varie entre lunettes et gymnastique des yeuxou chirurgie.La myopie peut cependant passer inaperçue car la vision deprès (propre au travail sur écran) estinchangée, contrairement à la vision de loin.Les médecins du travail sont particulièrementattentifs à ces problèmes. Ils n’hésiterontpas à envoyer leur patient vers un ophtalmologiste en cas desuspicion de troubles de la vue ou de pathologieassociée.Cap sur nos conseils anti-fatigue !Pour éviter ce phénomène de fatigue visuelle,il convient bien entendu de corriger sa vue avec des solutionsadaptées : lunettes (avec pour les presbytes des verres deproximité, également appelés verresinterview), lentilles (aujourd’hui mieux adaptée) ouchirurgie réfractive pour la myopie.Ensuite, quelques mesures de bon sens permettent d’améliorervotre environnement de travail :
Eviter les reflets sur écran. Le recours auxfiltres antireflet ne doit se faire qu’en casd’impossibilité d’autres aménagements, car ilspeuvent diminuer le contraste et gêner finalement la lecture;
Le champ de vision ne doit pas contenir fenêtre nisource de lumière directe pour éviterl’éblouissement. L’écran doit ainsi êtreperpendiculaire à la source de lumière ;
Utiliser des stores ou des rideaux mobiles empêchant lesreflets ;
Préférer des sources de lumièresindirectes (halogènes) ou individuelle (lampe debureau). Des plafonniers avec des sources de lumièreencadrée (avec des grilles limitant les problèmes dereflet) ;
S’imposer des pauses et privilégier l’alternance destâches. Un changement d’activité (ou de moments denon-fixation de l’écran) doit intervenir soit 5 mn pour 45mn de travail, ou 15 mn toutes les deux heures selon les experts.Mais des petits breaks visuels toutes les 15 mn peuventégalement faire l’affaire.De tels conseils permettent d’améliorer la situationgénérale de fatigue visuelle. Lors du congrèsde la société française d’ophtalmologie (SFO),une étude conduite sur 465 patients souffrant de fatiguevisuelle été présentée par le Dr ClaudeSpeeg-Schatz, ophtalmologiste à Strasbourg. Aprèsavoir suivi les conseils élémentaires, plus de lamoitié des salariés ont vu leur situations’améliorer. La persistance de la fatigue visuelle chez lesautres est probablement liée selon les auteurs à undéfaut de suivi des conseils donnés par lemédecin du travail, d’une absence de correction ergonomiquedu poste ou encore l’absence de prise en compte des modificationsde clignements… Des résultats qui soulignent lanécessité d’une bonne coordination entremédecins du travail et ophtalmologistes pour lutterefficacement contre la fatigue visuelle.Mais les recherches ne se focalisent plus uniquement sur le duooeil-écran mais plutôt sur le nouveau triocorps-oeil-écran. De récentes recherches enneurosciences ont ainsi souligné que la posture et donc ladirection du regard peuvent influer sur la perception del’information.David Bême